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Le lactate : la molécule clé pour progresser, performer et être en bonne santé !

Le lactate, cette molécule est au coeur des débats depuis plusieurs décennies dans l’entraînement des sports d’endurance.

On lui attribue souvent un rôle délétère pour la réalisation d’une performance, d’être mauvais pour l’organisme ou encore on l’utilise pour définir le fameux « seuil lactique ».

Essayons de démêler le vrai du faux en apportant des preuves sur l’intérêt du lactate pour renforcer la progression de l’athlète mais également sur son rôle bénéfique pour la santé.

1ère étape de compréhension du lactate, la contraction musculaire

Lorsque vous réalisez un exercice physique, les muscles ont besoin d’ATP (Adénosine Tri Phosphate) pour se contracter. Le stock intramusculaire d’ATP étant faible, l’organisme va devoir faire appel aux substrats issus de l’alimentation (glucides, lipides, protéines) pour produire de l’ATP.

L’ATP est une molécule présente dans tous les organismes vivants. Son rôle principal est de fournir l’énergie nécessaire aux différentes réactions chimiques de l’organisme. L’ATP est la réserve d’énergie de la cellule. Elle constitue la seule source d’énergie utilisable par le muscle. L’ATP étant présente en très faible quantité au sein de l’organisme, elle doit être constamment re-synthétisée via les voies métaboliques.

 

Concentrons-nous pour le moment sur l’utilisation des glucides à l’effort!

Les glucides sont stockés au niveau des muscles (réserve la plus importante de l’organisme) et du foie (concentration la plus importante) sous forme de glycogène. Les principales sources énergétiques de glucides à l’effort pour l’organisme sont le glycogène musculaire et le glucose sanguin (dégradation du glycogène hépatique ou directement de l’alimentation).

On parle de glycogénolyse lorsque le substrat initial est le glycogène et de glycolyse lorsque celui-ci est le glucose.

A haute intensité on va essentiellement utiliser la glycogénolyse pour transformer le glycogène musculaire (réserve de glucose au sein du muscle), contenu en forte proportion dans les fibres musculaires rapides, en molécule d’ATP.

Alors que sur des efforts plus longs on va utiliser l’oxydation du glucose et du glycogène dans la mitochondrie ainsi que les lipides, les protéines et le lactate !

La mitochondrie est la centrale énergétique de la cellule musculaire où se déroulent les dernières étapes chimiques pour transformer les substrats (glucides, lipides, protéines) en d’ATP

Revenons à la production du lactate au sein de l’organisme

A l’effort, le glycogène et le glucose sont transformés en pyruvate pour permettre la formation d’ATP. C’est à partir de là que ça devient intéressant, à ce stade le pyruvate va avoir 2 possibilités :

  1. Rentrer dans la mitochondrie pour y être oxydé et transformé afin d’aboutir à la formation de 38 molécules d’ATP
  2. Ou être converti en lactate par une enzyme appelée « Lacticodéshydrogénase (LDH) ».

Pour quelle raison le pyruvate est transformé en lactate par la LDH ?

Lorsque l’effort est soutenu, on va avoir besoin de beaucoup d’énergie, ce qui va entraîner une forte accumulation de pyruvate. Cette forte accumulation de pyruvate va saturer les capacités d’oxydation de la mitochondrie à transformer le pyruvate en ATP. Pour éviter cette saturation, le pyruvate produit en excès va être transformé en lactate puis être transporté vers d’autres sites qui ne sont pas saturés  (fibres musculaires lentes, coeur …) pour y être oxydé par la mitochondrie afin de servir de substrat énergétique. Le lactate en excès peut également être envoyé dans le foie pour reformer du glucose par le mécanisme de la néoglucogénèse. Rien ne se perd, tout se transforme dans notre formidable machine humaine !

Le transport du lactate

Le corps humain est bien fait, il y a des transporteurs spécifiques du lactate pour éviter la saturation et pour apporter de l’énergie aux muscles en activités.

Voyons un peu comment se passent les échanges de lactate entre les cellules (cf. figure 1), aussi appelé la navette lactique (lactate shuttle).

Lorsque le lactate s’accumule dans la fibre musculaire rapide (glycolytiques Type II) il est transporté en-dehors de la cellule musculaire par une protéine de transport « MCT4 » puis pris en charge par la protéine MCT1 qui va le faire rentrer dans la fibre musculaire lente pour être oxydé par la mitochondrie via l’enzyme mLDH (lacticodéshydrogénase mitochondriale) et servir ainsi de substrat énergétique à la place du glycogène et du glucose. Il faut savoir qu’à l’exercice, le lactate est préféré au glucose et aux acides gras comme carburant de l’effort.

Le lactate peut également être transporté dans le sang vers d’autres organes comme le coeur, le foie ou le cerveau (le lactate est le carburant préféré du cerveau).

Lors d’un effort prolongé près de 80% du lactate issu des muscles actifs est oxydé au sein de ces muscles (≈50% dans les fibres lentes et IIa et 28% dans les fibres rapides IIb).

 

Les 3 fonctions du lactate 

 

 Le lactate a un rôle majeur au sein du métabolisme énergétique :

  1. Le lactate est une source d’énergie majeure à l’effort
  2. Le lactate est le principal précurseur de la néoglucogénèse (synthèse du glucose à partir d’un composé non glucidique)
  3. Le lactate est une molécule de signalisation permettant d’activer, entre-autre, PGC1-alpha (chef d’orchestre de la biogenèse mitochondriale). L’exposition régulière au lactate permet de doubler la masse mitochondriale ce qui a pour effet bénéfique d’avoir une capacité d’utilisation d’oxygène améliorée à l’effort d’endurance et donc une plus grande capacité de performance. Plus de mitochondries c’est également la capacité d’assimiler plus de pyruvates, de synthétiser un nombre plus élevé d’ATP pour une meilleure fourniture énergétique. 

La biogenèse mitochondriale correspond à une augmentation du nombre de mitochondries. Avoir plus de mitochondries permet une meilleure utilisation d’O2 au niveau musculaire donc de meilleures performances d’endurance

A quoi correspond l’acide lactique?

En réalité l’acide lactique est très peu présente dans l’organisme. A l’effort l’acide lactique formée est très rapidement dissociée en 1 anion lactate et 1 proton H+.

  • L’anion lactate apporte de l’énergie à la cellule
  • Alors que le proton H+ rendrait acide le contenu cellulaire et le sang. Le proton H+ induirait la fatigue musculaire, ce qui remet en cause l’effet délétère du lactate et son utilisation pour définir les zones d’intensités à partir du concept de seuil anaérobie (sans oxygène) ou lactique.

Les 1ères recherchent scientifiques ont émis l’hypothèse selon laquelle l’acide lactique était produit à cause d’un déficit d’oxygène. Comme on l’a évoqué plus haut le lactate est produit par la glycolyse et la glycogénolyse, qui se produit avec la présence ou non d’oxygène, ce n’est donc pas un manque d’oxygène qui produit le lactate. Même au repos l’organisme produit de l’acide lactique alors qu’on est pas en anaérobie mais en parfaite situation aérobie (avec oxygène).

Faut-il utiliser le seuil anaérobie ou le seuil lactique ?

Le concept de seuil anaérobie (sans oxygène) est apparu à la fin du 19ème-début du 20ème siècle. Depuis on a fait de nombreuses découvertes, on sait que ce concept n’est plus adéquate. Déjà le terme « anaérobie » ne doit pas être utilisé, comme vu précédemment ce n’est pas un manque d’oxygène qui engendre une production de lactate. Le lactate est produit en continu dans l’organisme même au repos dans des conditions entièrement aérobie (avec oxygène).

Prenons l’exemple de la maladie de McArdle pour étayer nos propos sur le fait que la notion de « seuil anaérobie » n’est pas à utiliser. Les personnes qui ont la maladie de McArdle ne peuvent pas utiliser le glycogène comme source énergétique à l’effort. Les sujets sains ont une lactatémie qui s’élève autour de 70% du VO2max alors que chez les sujets ayant la maladie de McArdle la lactatémie reste basse. Par contre que ce soit chez les sujets sains ou malades, la ventilation s’accroit. Ca indique qu’il n’y a pas de corrélation entre le seuil ventilatoire et le seuil lactique.

Lors des études scientifiques portant sur l’entraînement on utilise le seuil lactique avec un taux de 4mmol/ l pour voir si l’athlète a progressé. En fixant ce taux arbitraire on peut ainsi voir si l’athlète développe une intensité plus élevée à 4mmol de lactate ce qui signifierait une amélioration du rendement énergétique entre la production et la disparition du lactate. Un athlète qui progresse aura ainsi une capacité à utiliser plus de glucose et de lactate à l’effort puisque le lactate sanguin représente seulement la quantité qui n’a pas pu être utilisée comme source énergétique. En effet, un taux de lactate sanguin inférieur aux prévisions chez un athlète est le signe d’une amélioration de l’utilisation du lactate comme source énergétique.

La production de lactate est proportionnelle à l’intensité de l’exercice. L’élévation des lactates ne fournit pas d’information sur l’oxygénation des tissus mais plutôt sur l’équilibre entre la production et l’oxydation des lactates. Le seuil lactique peut renseigner sur les mécanismes de contrôles physiologiques et sur l’état d’entraînement de l’athlètes (amélioration, stabilisation, régression) mais ne doit pas être utilisé pour prescrire des intensités d’entraînement.

Le lactate peut représenter un biomarqueur de la contrainte physiologique et métabolique. L’élévation du lactate sanguin indique ainsi qu’un athlète n’est pas dans un état métabolique stable.

Dans ce cas, l’utilisation du seuil lactique pourrait s’avérer intéressante pour construire les zones d’intensités ?!

Même si l’idée est séduisante, elle se heurte à quelques problématiques qui limitent l’utilisation du seuil lactique pour prescrire les intensités d’entraînement.

Selon la méthode de détermination utilisée on peut dénombrer 15 seuils lactiques différents (ça peut même monter à 25). Dans l’exemple (figure 3) on voit qu’on obtient une large gamme de puissances (entre 243W et 338W) pour un même cycliste (Jamnick & al., 2018).

D’autres facteurs peuvent également influer sur la production de lactate durant l’exercice et ainsi fausser le seuil lactique (SL) :

  • Un régime riche ou pauvre en glucides peut déplacer respectivement vers la gauche ou vers la droite, la courbe d’augmentation des concentrations sanguines de lactate et donc, déplacer le « S.L. »
  • Le niveau des réserves en glycogène de l’athlète avant de déterminer le SL. L’athlète ayant des faibles réserves en glycogène lors d’un test, cas des athlètes qui s’entraînent régulièrement, pourra avoir un SL décalé montrant une plus faible production de lactate pour une intensité similaire. Ca ne représentera pas une amélioration de son statut d’entraînement mais tout simplement un manque de glycogène pour produire de l’énergie.
  • L’ingestion de caféine qui augmente la lactatémie lors de l’exercice
  • La température lors de la passation du test : le froid ferait diminuer la lactatémie alors que la chaleur l’augmenterait.

 

Comment déterminer un seuil métabolique pour utiliser les aspects positifs du lactate pour progresser ?

 

La puissance/ vitesse critique que nous utilisons dans GUTAÏ permet de représenter un marqueur seuil. Au-dessus de l’intensité critique définit dans GUTAÏ il y a une contribution obligatoire de la glycolyse avec une nette accumulation de lactate.

A l’heure actuelle des connaissances scientifiques, la puissance/ vitesse critique peut être considérée comme le marqueur le plus fiable pour construire les zones d’intensités, surveiller l’efficacité de l’entraînement et prédire la performance (Poole & Jones, 2012 ; Poole et al., 2016). La puissance/ vitesse critique a l’intérêt d’englober les mécanismes physiologiques sous-jacents qui distinguent un exercice difficile pouvant être maintenant sur une longue durée (Z2 GUTAÏ Intensity) , d’un exercice à haute intensité (Z3 GUTAÏ Intensity) pouvant être maintenu sur une durée plus limitée.

Intérêt du lactate pour le contrôle métabolique des glucides et des lipides

La glycémie est maintenue stable par la néoglucogénèse du lactate pendant l’exercice et en particulier durant l’entraînement à jeun. Un taux élevé de lactate lorsque le glucose sanguin est faible permet ainsi de prévenir l’hypersécrétion d’insuline et l’hypoglycémie profonde durant l’exercice.

L’utilisation de régime alimentaire limitant l’apport en glucides peut limiter les performances d’endurance et d’ultra-endurance. Pour pouvoir utiliser le lactate comme précurseur de signalisation cellulaire (cf. la fameuse biogenèse mitochondriale) il faut des glucides lorsque la dépense énergétique est augmentée (exemple : lors d’une séance HIT). Pour être performant dans les sports d’endurance il faut également avoir recours à la glycolyse, qui va augmenter la teneur en lactate (qui sera réutilisé comme source énergétique) mais également réduire voir épuiser les substrats glucidiques à un rythme en relation avec l’intensité développée (< ou > SL). Sans un stock de glycogène élevé et/ ou un apport constant en glucides exogènes il y aura une réduction inexorable de la performance d’endurance.

Mais le lactate ne régule pas que la glycémie, il inhibe également la lipolyse (utilisation des lipides à l’exercice) lorsque l’athlète n’est pas exposé régulièrement au lactate lors des séances d’entraînement. Par contre à long terme, l’exposition régulière au lactate permet de réguler la tolérance au glucose, l’oxydation des lipides et la répartition globale du substrat énergétique.

Voila encore un aspect positif du lactate mais comme on va le voir le lactate ne se limite pas qu’aux aspects sportifs, c’est aussi une molécule très intéressante au niveau santé.

Le lactate c’est la santé !

Le métabolisme du lactate est de plus en plus étudié dans le secteur de la santé. Il est par exemple proposé pour la cicatrisation des plaies et la régénération musculaire après une blessure. Il intervient également dans :

  • La régulation de la glycémie : le lactate est le principal précurseur de la gluconéogenèse (GNG : synthèse du glucose à partir de composés non-glucidiques)
  • Le traumatisme cérébral : le lactate est un carburant pour le cerveau et un anti-inflammatoire
  • La réduction l’inflammation via la liaison GPR81 en aval du signal lactate
  • Le traitement de la pancréatite et hépatite aiguë : le lactate est un substrat énergétique, un précurseur du GNG et un anti-inflammatoire
  • L’infarctus du myocarde, chirurgie cardiaque et insuffisance cardiaque aiguë : le lactate est le carburant du cœur
  • Le soin des brûlures : le lactate est un substrat énergétique, un précurseur du GNG et un agent anti-inflammatoire
  • Le traitement de la septicémie : L’incorporation de lactate dans les fluides de réanimation peut favoriser le maintien de la pression sanguine et la circulation, aident à fournir des antibiotiques ainsi que de l’énergie
  • La cognition (traitement de l’information au niveau cérébral) : le lactate traverse facilement la barrière hémato-encéphalique, alimente les neurones et stimule la sécrétion de BDNF, améliore la fonction exécutive et la mémoire
  • … … …

L’exercice physique régulier est bénéfique pour réduire les risques de nombreux cancers courants, notamment ceux du sein, du côlon, de la vessie, de l’endomètre, de l’œsophage, des reins, des poumons et de l’estomac (Powell et al., 2019).

Finalement le lactate n’est pas si mauvais que ça, il faut juste en finir avec les croyances populaires

Que doit-on retenir ?

  • Le lactate n’est pas un déchet mais une source d’énergie.
  • Le lactate est le témoin de la production d’ATP par la glycogénolyse ou la glycolyse
  • Lorsque le lactate est produit il peut être transféré d’une cellule à une autre et servir de substrat énergétique à la place du glucose, des lipides et des protéines
  • Le lactate n’est pas un déchet ou responsable de la fatigue mais il en est le principal messager.
  • Le lactate peut provoquer un grand nombre de réponses adaptatives qui coordonnent le métabolisme énergétique. Le signal physiologique du lactate est en amont d’autres signaux, il dirige l’adaptation cellulaire en affectant l’expression d’une centaine de gênes.
  • L’exposition répétée au lactate lors d’un exercice régulier entraîne des processus d’adaptation tels que la biogenèse mitochondriale et d’autres caractéristiques bénéfiques pour la santé comme une meilleure flexibilité métabolique
  • Lorsqu’on utilise bien le métabolisme du lactate on peut améliorer l’entraînement de l’athlète en ayant une meilleure compréhension sur son contrôle métabolique et respiratoire, l’utilisation de l’énergie durant l’exercice, les processus de fatigue et d’intolérance à l’effort.
  • Le foie assure un rôle essentiel dans la régulation de la glycémie.
  • Informer sur les stratégies nutritionnelles optimales pour les athlètes d’endurance et d’ultra-endurance
  • Le lactate peut faire partie du traitement pour soigner des maladies ou guérir des blessures

On vous a convaincu sur l’aspect positif du lactate ⁉️

Photo de Karoly

Karoly Spy, Innov Training CEO & Founder, Vaison-la-Romaine

Karoly est le fondateur de l’application GUTAÏ. Aimant prendre en compte tous les détails liés à la performance pour permettre à l’athlète de développer l’ensemble de son potentiel, il a mis en place une méthodologie d’entraînement dans GUTAÏ avec une approche globale pour ne rien laisser au hasard et maximiser son temps d’entraînement.
Avec plus de 20 ans d’expérience dans l’entraînement d’athlètes d’endurance, que ce soit avec des professionnels ou des amateurs, Karoly s’occupe particulièrement des aspects entraînement & innovation dans GUTAÏ ainsi que de la formation des entraîneurs de la GUTAÏ Academy.

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